Farzad Kamangar, enseignant et syndicaliste kurde, est un des prisonniers politiques kurdes menacé d’exécution. Il a été condamné à mort pour « morabeh » (ennemi de Dieu) en février 2008.
Laissez battre mon cœur,
Je suis emprisonné depuis de nombreux mois ; une prison qui était supposée me prendre et détruire ma détermination, mon amour et mon humanité. Une prison qui était supposée me pacifier et faire de moi un « mouton docile » ; depuis des mois je suis dans une prison avec de grands murs, aussi hauts que l’Histoire. Des hauts murs qui étaient supposés me séparer du peuple que j’aime ; un espace permanent entre moi et les enfants de ma patrie ; et cependant, je regarde chaque jour à travers la fenêtre de ma cellule et me voit avec eux et semblables à eux et ils voient leurs souffrances en me voyant comme prisonnier ; aussi la prison nous a lié encore plus profondément qu’avant. Il était prévu que l’obscurité de la prison emmène au loin la signification et l’importance de la luminosité et de la clarté, mais en prison j’ai été témoin du développement de la violette dans l’obscurité.
Il était prévu que j’oublierai le sens du temps et sa valeur ; mais j’ai vécu hors de la prison à chaque moment et je suis rené à nouveau pour choisir un nouveau chemin.
Et, comme les prisonniers avant moi, j’ai supporté aussi les insultes, les agressions, et les mauvais traitements avec l’espoir que je serais le dernier à souffrir de l’obscurité de la prison. Mais un jour, ils m’ont appelé « combattant », suggérant que j’aurais mené une guerre contre leur « dieu », pour me faire porter la corde de la justice et mettre fin à ma vie à l’aube. Depuis, j’attends l’application de l’ordre de ma mort. Pourtant, maintenant qu’ils veulent me prendre ma vie, pour mon amour du genre humain, j’ai décidé de donner mon corps à des malades qui pourraient en profiter après ma mort. Je voudrais aussi donner mon cœur, qui est plein d’amour et d’affection, à un enfant. Qu’importe d’où vienne cet enfant, qu’il vienne des bords de la rivière Karoon, des pieds des montagnes Sabalan, du désert de l’Est ou des montagnes Zagros. Le plus important est que mon coeur inquiet et rebelle batte dans la poitrine d’un enfant qui, encore plus révolté que moi, partage les désirs de son enfance avec la lune et les étoiles pendant la nuit et les prennent pour témoins qu’il ou elle ne trahira pas ses rêves d’enfant une fois adulte. Je souhaite que mon coeur batte dans la poitrine de quelqu’un qui est inquiet pour les enfants qui dorment avec la faim pendant la nuit ; de quelqu’un qui célèbre la mémoire d’Haamed, un élève de seize ans de ma ville, qui a écrit « même mes plus petits rêves dans cette vie ne peuvent être atteints » avant de se pendre.
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