Dernière lettre de Shirin Alamhouli (nom aussi retranscrit Shirin Alam-Hooli), arrêtée en mai 2007, torturée, condamnée à mort et exécutée ce matin, dimanche 9 mai, à Téhéran. Ce texte a été publié par « Street Journalist » le 9 mai.
« Je suis une otage »
J’entre dans ma troisième année de détention, trois années dans les pires conditions derrière les barreaux de la prison Evin. J’ai passé les deux premières années de prison sans un avocat et en détention provisoire. Toutes mes demandes concernant mon dossier sont restées sans réponse jusqu’à ce que je sois injustement condamnée à mort. Pourquoi suis-je emprisonnée et pourquoi est-ce je vais être exécutée ? Est-ce seulement parce que je suis kurde . Si c’est le cas, alors je dois dire que je suis née kurde. Le kurde est ma langue, la langue que j’utilise pour communiquer avec ma famille, mes ami(e)s et ma communauté et la langue avec laquelle j’ai grandit. Mais je n’ai pas été autorisée de parler ou de lire ma langue, je n’ai pas été autorisée d’aller à l’école dans ma propre langue et je n’ai pas été autorisée à l’écrire. Ils me disent de nier mon identité kurde, mais si je le fais, cela voudra dire que je nie qui je suis. Messieurs le juge et les enquêteurs : lorsque vous m’avez interrogée je ne pouvais pas parler votre langue et je ne pouvais pas vous comprendre. J’ai appris le farsi ces deux dernières années avec mes amies dans la section pour femmes de la prison. Mais vous m’avez interrogée, jugée et condamnée dans votre propre langue sans même penser que je pouvais ne pas la comprendre et ne pas me défendre. La torture que vous m’avez fait subir est devenue mon cauchemar.
Je souffre en permanence à cause de la torture que j’ai subi. Les coups sur ma tête lors des interrogatoires m’ont causés des problèmes et parfois je souffre de sévère migraines, où je perds le sens de moi-même, où mon nez se met à saigner de douleur et il me faut plusieurs heures pour me sentir à nouveau normale. Un autre « cadeau » que vos tortures m’ont laissée est le dommage causé à mes yeux qui s’aggrave de jour en jour. Ma demande pour avoir des lunettes est restée sans réponse. Lorsque je suis entrée dans cette prison, mes cheveux étaient noirs, maintenant, après trois ans de prison, mes cheveux ont commencé à devenir blancs. Je sais que vous avez fait subir tout cela non seulement à moi mais à tous les kurdes, comme Zeynab Jalaliyan et Ronak Safarzadeh… Les yeux des mères kurdes sont pleines de larmes en attendant de voir leurs enfants. Elles sont dans un état d’angoisse permanente, l’angoisse à chaque coup de téléphone qui pourrait leur apporter la nouvelle de l’exécution de leurs enfants.
Aujourd’hui c’est le 2 mai 2010, et une fois encore ils m’ont emmenée à la section 209 de la prison Evin pour un interrogatoire. Ils m’ont demandée de coopérer avec eux pour être pardonnée et pas exécutée. Je ne comprends pas ce qu’ils veulent dire par coopération, alors que je n’ai rien de plus à dire que ce que j’ai déjà dit. Ils veulent que je répète ce qu’ils disent, mais je refuse de le faire. L’enquêteur m’a dit : « nous voulions te libérer l’année dernière, mais ta famille n’a pas voulu coopérer avec nous et c’est pour ça que les choses ont tournées comme ça ». Il m’a avouée que je suis une otage et que tant qu’ils n’auront pas atteint leur but ils me maintiendront en prison ou m’exécuteront, mais ils ne me libéreront jamais.
Shirin Alamhouli
A la fin de sa lettre, sous son nom, Shirin a ajouté le mot “Serkefitn” ce qui signifie « victoire » en kurde.
[…] Kamangar, Ali Heydarian, Farhad Vakili, Shirin Alam-Hoolee et Mehdi Eslamian ont été exécutés aujourd’hui (9 mai) dans la prison Evin par le régime […]
[…] autorités iraniennes ont pendu ce matin cinq militants kurdes, dont une femme, qu’elles accusent d’avoir mené des attentats contre des bâtiments gouvernementaux ainsi […]
[…] – Shirin Alamhouli (nom aussi retranscrit Shirin Alam-Hooli) avait été arrêtée en mai 2007 et a été condamnée à deux ans de prison pour “sortie illégale du pays” et à mort comme “ennemie de Dieu pour ses liens avec l’organisation Pejak”. 2000 militant(e)s des droits humains d’Iran avaient demandé l’annulation de sa condamnation à mort. Elle avait été sauvagement torturée en détention (voir son témoignage). Dans un dernier courrier, écrit le 2 mai 2010, elle disait “je suis une otage“. […]
[…] agents de sécurité ont arrêté la mère et la soeur de Shirin Alamhooli à Maku, une ville de la province iranienne de l’Azerbaïdjan […]
[…] Shirin ALAM-HOLI, cette militante kurde a été exécutée. Elle est devenue l’exemple de résistance pour des milliers de femmes qui ont pris le chemin de la lutte pour l’émancipation et pour finir avec l’ordre établi par le régime de la République Islamique pour lequel la femme est potentiellement « coupable ». Etre femme et kurde à la fois est un « délit » impardonnable sous la République Islamique. […]
[…] au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK turc). La seule femme du groupe exécuté, Shirin Alam-Holi, était accusée d’appartenance à un autre groupe kurde, le Parti pour une vie libre au […]
[…] pour mettre en garde sa famille de ne pas participer à la grève. La mère et la soeur de Shirin, et plus tard son grand-père, un oncle et un cousin ont été arrêté puis libérés sous […]
[…] enseignant et syndicaliste et les quatre Kurdes Mehdi Eslamian, Ali Heydarian, Farhad Vakili, Shirin Alam-Holi ont été pendus le dimanche 9 mai dans la prison d’Evin, à Téhéran. Ils étaient accusées […]
[…] Shirin Alamhooie, Farzad Kamangar, Farhad Vakili, Ali Heydarian et Mehdi Islamian ont été pendu à l’aube le 9 mai. Et six jours après leurs exécutions, leurs corps n’ont toujours pas été rendus à leurs familles et on craint que le gouvernement n’enterre les corps en secret par peur des protestations populaires. A travers tout le pays et dans le monde, les protestations et les réactions continuent. Les familles se sont rassemblées devant la prison Evin pour récupérer les corps de leurs chers proches pendant plusieurs jours sans aucun résultat. Elles ont même été menacées d’arrestation. L’esprit courageux de ces familles est indéniable. Elles sont comme celui de leurs chers proches ! Elles ne capitulent pas face à la sauvagerie du régime et restent fortes et en colère. […]
[…] Shirin, elle aussi exécutée le 9 mai, avait écrit une dernière lettre le 2 mai où elle dit « je suis une otage » : https://iranenlutte.wordpress.com/2010/05/09/derniere-lettre-de-shirin-executee-le-9-mai/ […]